Un
tweet au bon Dieu,
Des
besoins de la ville au bon Dieu.
Les
ingrats iront en enfer.
Tornade
de délires dans une vieille calebasse
Courbé,
la nuque pendante et endolorie, à ne plus pouvoir supporter sa propre tête, le
dos penché, les membres tremblants, le pas mal assuré, en face d’un groupe qui s’avance,
le vieux parlementaire fait quelques pas dans sa ville de retraite. En sortant
voir le peuple, il veut s’éviter la sédentarité et voir encore un peu en les
gens pour ne pas perdre de sa proximité et de sa popularité. Perclus, comme les
partis ruinés par leurs diatribes et la politique des patchs, dont il a
démissionné, il lui reste une petite retraite pour s’acheter encore des
médicaments. Et faire quelques pas sous le soleil auquel l’ancien homme des
coulisses et des labyrinthes, s’était peu exposé. Le peuple et la lumière de
Dieu, quel bonheur, pense-t-il, ému !
Qu’est-ce
qui vient en face ? Sont-ce des mercenaires, se dit-il ? Des Daech
d’importation, des GI qui viennent avec les Russes nous éliminer ? Il s’écarte
vers le mur, par instinct et regarde vers le haut par sagesse. Un bruit de drones,
version apocalyptique d’Hollywood, vous l’achève de peur, dans cette ville
de cauchemar éveillé, où il vient terminer ses
jours. Il en tremble à vous communiquer les secousses de son parkinson.
Non,
ce sont que les monstres de la ville. Une petite descente pour la frime. Balak,
ânedak, hayed mène trégue ! Dégage, le vieux ! Le monde appartient
aux plus mauvais, lui lancent-ils en musique de rue ! Gonflés d’arrogance
et doublés de mépris, c’est une marque d’intelligence, qui témoigne de leur
adaptation au milieu. Sont-ce les fils des nantis et nos riches élus qui
s’éclatent si ostensiblement ? Que non ! Qui oserait les indexer par
les temps qui courent !
Ils
n’ont pas besoin de faire le trottoir ni de le réparer ! Le trottoir et
ses dépendances appartiennent alors, à leurs amis ? A ceux de leurs
protégés qui exhibent les fonctions de leurs amis pour se permettre tout ce qui
bouge !
Des
népotistes ? Non, ceux-là, ils sont discrets ! La ville, la rue, sont
à ceux qui roulent les mécaniques. Ceux qui vous montrent leurs muscles, leur nombre,
leur inculture, leur ignorance, leur anticivisme, la carence de leur morale et
les vertus de leurs armes !
Notre
Parlementaire regrette que l’Education Nationale en soit venue à les rejeter
dans la rue. Il constate que c’est elle qui est en défaut. Elle, et les
faiseurs de cours, de programmes, de budgets et de lois, en sont les causes de
leur amoralité de drogués, de leur criminalité et de leurs conduites de
barbares. Il se remémore ses joutes au Parlement. Des années fort nombreuses
durant, avec des sommités qui ont les belles heures de ce parlement. De
profundis, Allah yarhamhoum !
Il
revoit les récentes images de télé et les scènes de crimes perpétrés par les
colons en Palestine. Puis celles, abominables, qu’il a vues sur le Net, là où
s’inventent toutes sortes d’horreurs inhumaines ! Les guerres civiles et
entre frères de même religion au Moyen-Orient le déstabilise même sur le plan
de son crédo de musulman ! Nous, ça, faire ça entre nous ? Quelle
humanité sordide ! Puis, il se réveille au réel. Ces ignobles énergumènes roulent
les hommes et les poussent aux guerres ! Eux, ils sont en sécurité dans
leurs pays, fermés, par égoïsme, certes, mais aussi, par prudence ! Ils ont
de puissantes machines, terre, air, mer, espace ! Ils roulent sur de l’or.
Ils nous roulent et eux, ils roulent dans de fastueuses mécaniques. Peu
importe ! Les vrais champions, existent. Salut aux jeunes nôtres, à ceux
qui s’illustrent de loin et hissent notre drapeau. Ils aident les leurs,
discrètement ou de visu. Et c’est très bien, ainsi !
Cette
image lui revient et l’obsède.
Tels
des rouleaux compresseurs, aux cylindres compacteurs, les bulldozers se ruent,
sur les piétons, comme à la sortie des stades. Armés de cimeterres, les
hooligans, vont nous laminer, ou nous écraser, comme le furent ces pauvres
pèlerins de Mina, en Arabie, 2222 personnes écrasées, asphyxiées à la Mecque.
Heureusement qu’il a été au pèlerinage, lui, El Haj Bassou, avec sa Hajja,
avant que le nombre des pèlerins n’engendre des mesures contraignantes et des
quotas de rigueur ! Et puis, c’est devenu si cher de tourner autour de la
Kaaba. Ce symbole cubique est menacé et assombri par ces nombreux immeubles de
luxe, hauts de 300 mètres et plus. A en perdre sa sacralité première ! Et à
décourager les Musulmans ! Qu’Allah me pardonne, ces idées qui m’assiègent
! Se dit-il.
Il
se réveille mal de ses divagations nostalgiques. En voulant s’écarter de la
horde et de ses ruades animales, il glisse sur des feuilles mortes. Une chute
violente ! Tout un tas de feuilles, sur tout le trottoir, non ramassés par
les agents de la malpropreté municipale. Il a failli tomber, là, lui. La
hchouma ! Sous le regard vindicatif et méchant des soudards. S’il a échappé
de peu à la chute, son esprit était avec les autres feuilles.
Les
papiers écrits, les copies des articles de presse, qu’il fallait ranger ou donner
à ses connaissances, afin de les informer. Ou encore, les photocopier pour les
distribuer aux refuzniks, pour les éveiller. Il vient d’apprendre, sous la
colère de sa secrétaire, qu’ils les jettent sans respect et sans daigner les
lire dans la grosse poubelle de derrière le parlement ? Oui, ils
pourraient, s’ils étaient éduques téléphoner simplement pour le remercier…Et
les jeter, moins ostensiblement ! Ma kayenche meâa mène !
Il
revoit son père menuisier et son grand père, le Fquih des Soufis de la médina,
connu dans bien des villes aussi. Il venait des fois dans ce trou, au temps des
américains, il y avait des fidèles. Il les voit sont en train de mener la
prière de midi. Allahou akbar, la ilaha illa Allah ! Il est en retard à
cause d’une session parlementaire qui a tardé. Il doit faire ses ablutions. Son
oncle l’attend. Le roi n’est pas venu pour célébrer la prière de ce vendredi,
car il voyage aux Indes. Il doit aller nous chercher des épices, des films et
des saris en soie, des paons et de belles plantes pour égayer nos jardins. Alors
que les jeunes médecins font la grève des cours, à cause de ce qu’on leur a
imposé comme services impromptus. Ils reçoivent de leur maître Ssi Rosé, la
tannée de leur vie. Dans quel climat psychologique vont-ils assumer leur magistère
et leur serment ? Dans quelle conditions après qu’on ait lâché la médecine
à n’importe quels capitaux ?
Politiquement
correct
Ces
délires furtifs et nombreux, mêlés de regrets et d’impuissance, lui ont fait
perdre la conscience, à notre Haj Bassou. Il était ailleurs. Il a mal, il a si
mal, que ça l’a maintenant réveillé.
Pourquoi
s’écarter devant les truands du boulevard ? Dans son délire réflexif, il fait
une autocritique. Il se dit que par éducation et par respect, il est devenu
pudique et timide, voire aussi bon diplomate et psychologue que …lâche !
C’est à force de compréhensions, de gentillesses et de concessions ! Ça
porte un nom qu’il ne veut pas se dire. Et qu’il faut taper sur la table, affronter
virilement, oser, faire l’hystérique, y aller martialement quitte à rager et à crier,
quitte à perdre son self contrôle et son salaire ! Si on se doit défendre
les gens, ceux qui ont voté pour lui, gratuitement, il faut qu’il fasse non
seulement l’avocat mais aussi le soldat ! Et aucunement perdre de vue les
programmes et les recommandations de son Parti. Et puis, malgré les jeunes
leaders d’aujourd’hui, trop nerveux, ne jamais penser à faire le saut de l’ange.
Se refuser de changer d’alliances et de camp ! Refuser d’opter pour un
autre courant, même si le sien accuse en ce moment des faiblesses ! Car,
se dit-il, aucun de cette quarantaine de partis, qui radotent bien des choses, ne
dit avec de la même vigueur que le sien de parti, cette devise qui a poussé les
marocains à la Marche Verte et aux sacrifices, Allah, Al Watane , Al
Malik ! Le délire continue…
En
état de choc, toute sa vie lui vient en tête
Les
loups en ricanant fort, les hyènes, ne se sont même pas retournés pour voir le
pauvre blessé qui vient de tomber devant eux, et qui criait intérieurement. Comme
ils ont tancé hargneusement la Folle au chapeau colonial, habituée de ce
trottoir aux faux poivriers. Jambe dessous, jambe dessus, elle roulait les
papiers pour les fumer, en guise de cigare. Le tenant à l’envers, elle semblait
lire un journal ou qu’elle mimait de le faire, en cachant avec son journal ses
cuisses dénudées, par la misère des hommes. La sienne, d’abord.
C’est
un autre usage de la presse papier que les journalistes ignorent. Il sert de
vêtement. Elle ne les a même pas regardés, ces macaques, qui la moquent et la
craignent à la fois. Mais, elle a vu le vieux parlementaire accroupi, choqué.
Demain, se dit-il, il ira se plaindre au maire, il ira en parler aussi à madame
la Wali. Entre temps, la folle au chapeau colonial, lui montre du doigt, le
cabinet médical du Dr Balbi. Il ne comprend rien aux gestes, simples de la bonne
folle ! Il ne connait pas de docteur Balbi. Car Balbi, le toubib italien,
est mort, juste après avoir déménagé.
Eberlué
encore, il se rappelle les Daech de cette triste avenue…Il n’y pas de loi,
ici ! Lui faut-il retourner habiter à la capitale? Lui aussi !
Ont-ils
des sabres cachés, ces assassins ? La question ne se pose pas. C’est pour
ça qu’il les a esquivés. Oublieux du vieux qui est resté couché, ils ont
d’autres affaires dans leurs méninges souillées. Ils semblent poursuivre un
trio de filles qu’ils draguent et harcèlent depuis un moment. De simples
plaisanteries d’ados…Armés ! Si ce ne sont pas les bijoux en toc qu’elles
portent, ce sont d’habitude leurs phones qui les intéressent ou leurs sexes qui
les excitent et les fascinent au plus haut point ! Ou que ce sont que les sacs
de ces femmes qu’ils cherchent à leur arracher qui les intéressent au plus haut
point ? Achats de drogues obligent ! Je crains pour elles que les
armes blanches ne sortent de leurs étuis pour les déchirer et les tuer, dès
qu’elles s’opposent à leur lâcher.
Déménager
la ville ou l’accoler à la capitale ?
Cette
ville perdra avec la Régionalisation, c’est certain ! La vie va renchérir
et pousser à la misère ses retraités et anciens prolétaires ! Qui
s’occupera de cette ‘’ville-quartier’’ ? Le Président de la région de la
capitale, le Superwali ? Car déjà, la rue est mal éclairée, toutes les
rues ? Non ! Les trottoirs sont sales, pleins de trous, de détritus et de
carreaux cassés. C’est fort fréquent. C’est une rengaine qui fait office de
refrain et de slogan. Chacun le récite comme un hymne pour calmer son deuil sur
les choses qu’il voit et qui le dépassent. Comme vous, vous dit le Sénateur, je
connais les calvaires des exilés politiques et l’émigration économique. Puis celles
des expatriés des pays en guerre. J’ai connu plusieurs personnes qui ont changé
de ville, ne trouvant plus ce qu’ils méritaient dans celle-ci ! Leur constat
de l’absence chronique de confort dans cette cité a été déterminant. Ainsi dès
que leurs affaires marchent, ils se sauvent vers les quartiers huppés ou
simplement plus propres de la capitale.
Beaucoup
de joies et de bonheur se lisent sur les visages des concitoyens quand la ville
se maquille pour recevoir SM le Roi. Ils aimeraient bien, qu’il vienne habiter dans
cette ville, pour qu’elle revive et sorte de son état de dortoir. Mais, dans son
état, cette ville est à éviter. Elle ne tient à rester qu’un pont, fidèle à son
nom vernaculaire, pour aller ailleurs !
Pour
ma part. Je ne savais pas que j’allais recevoir ce jour une dame, qui s’était
vaillamment défendue contre un dépeceur local. En se défendant, après s’être
débattue et débarrassée du tueur, elle eût ‘’seulement’’ la tête fracassée sur
une grosse pierre, qui encombrait le trottoir ! Les pierres malencontreuses,
que les services laissent traîner, seraient-elles pire que les sabres de Daech
et les lames des tcharmiles ? Merci la municipalité de vous occuper encore plus
de ces zones où la malpropreté menace la vie des gens, en rendant hideuse et amochée
votre ville !
Il
y a trop de tables de cafés par-ci et trop d‘yeux perçants par-là ! Des scanners
pendulaires, rotatifs et élévateurs, qui veulent vous faire tomber ou vous
relever la jupe. Découvrir ce que n’a pas fait encore le vent ! Et puis, il n’y
a plus que des blue-jeans qui emmaillotent les éléments ! Vous sentez ces jeteurs
de sorts, Mesdames ! Les passants comme ceux qui se prélassent soudés à
leurs cafés, et qui vous violentent par télépathie !
L’INDH
expliquée aux villes
SOS !
Danger ! Au point que les filles ou les femmes peuvent se sentir réellement
violées dans leur intimité ! Et ça leur colle, si ce ne sont des migraines,
des névralgies et des maladies psychosomatiques, dont le facteur clé est l’insécurité.
Que sais-je encore, si ce n’est que les médecins en ignorent la véritable
cause, qu’ils ne cherchent pas. Mais, c’est celle que j’ai citée par devant. C’est
cet état d’insécurité, constant, face à autrui dans la cité lugubre, par
endroit. La mal vie ? Non, vous ne rêvez pas ! C’est plus qu’un
sentiment, c’est la peur physique et organique, la terreur des éléments !
D’où
le véritable chantier, eternel et vivant, éducateur civique, cette bonne idée
que je vous livre ! Une INDH citoyenne, urbaine, par tous et pour tout le pays.
Celle qu’il est de changer les habitudes et améliorer le milieu de vie.
Urbaniser, est une opération civilisationnelle qui commence par le par le b, a,
ba, qu’est La Propreté. Instituez-la de façon souveraine, messieurs, Dieu vous
le revaudra !
Seigneur, des
semaines de propreté, organisées, guidées par les Walis de l’Intérieur, les
maires et les présidents sont une bonne idée à creuser par vos conseillers. Et
comme une culture, nouvelle, patriotique, un programme pour concerner les
citoyens, à répéter plusieurs fois par an ces semaines, afin de curer leurs
villes ! Là où ils passeront leur vie ! Les façades, les vitrines,
les peintures, les trottoirs, les bouches et les regards d’égouts ! Les trous,
les arbres pleureurs et pendants, avec les reliefs qui salissent les alentours.
Suffisamment de poubelles et non plus, ce rien, ce petit nombre d’affreuses
boîtes cassées, et leurs détritus qui débordent, toujours, toujours,
toujours ! Avec des rivières purulentes, nauséeuses et malsaines !
En
voulez-vous les photos ? C’est une honte, une sale guerre bactériologique,
ignorée ou pas, que l’on impose sans conscience ni vergogne, aux résidents. Des
lacs et des flaques qui remplissent la chaussée et qui puent de leurs effluves
plus que les encres de l’enfer. L’enfer ce ne sera pas le feu, mais simplement
d’atroces odeurs ! Celles qui émanent de nos saletés constitutives,
finalement ! Celles et de nos ordures et déchets organiques. Notre ville,
via Satan, exportera vers l’Au-delà, ces satanées pourritures, pour punir les
méchants ! Pour punir d’abord les coupables de nos ignorances et de nos droits
sanitaires ! N’est-ce pas ? On pourrait écrire des choses plus lyriques et
des romans d’amour ou de politique, mais là, notre milieu, en premier, nous
interpelle ! Et c’est une autocritique.
Pour
l’autocritique des Maires
Ces
regards hypnotiques sont tellement lourds et épais, qu’il y a des filles qui
peuvent s’y coincer, chuter ou se faire harponner et emprisonner, dans les
mailles de leurs filets. Autant de pièges et d’épreuves décourageantes qui vous
obligent à rester chez vous, les femmes ! Ou que ce ne soient, que des raisons
civiques, justes et naturelles, pour responsabiliser les services très concernés
et si mal impliqués. Insulter les sociétés concessionnaires ou les cadres élus,
est si général, si vrai et si bas, qu’il ne faut pas penser le relever, ici, comme
un délit, un défi ou une opinion ! C’est une nature, incivique !
Des
branches d’arbres pendantes, envahissantes, colonisent en le réduisant l’espace
alloué aux piétons. Cette avenue de cette ville, cette rue, cette ruelle, ont
besoin de contrôleurs pour évaluer quotidiennement ce qui ne marche pas. A quoi
sert la municipalité si elle ne s’occupe pas des rues ? Je ne vise aucune
ville, là, c’est valable pour celles qui se reconnaîtront. C’est comme si on
avait, çà et là, poussé sans plan, sans essences, végétales, sans urbanistes ni
jardiniers compétents. Par endroits, les barricades des chantiers réduisent les
trottoirs. Le piéton malgré lui est déjeté sur le macadam, qu’il traverse,
indolemment. Et ça devient une nature, une culture générale, une fibre
patriotique ! Beaucoup de gens, la tête ailleurs et les yeux rivés sur
leurs phones, traversent le boulevard ou l’avenue, sans se soucier du danger…L’existence
de cet autrui, qui conduit sa voiture hypnotisé par son GSM aussi ! Ils
déambulent et trainent, ils marchent par groupe, sur l’asphalte, faute d’espaces
sur les trottoirs.
En
dix ans, le nombre de voitures de cette ville s’est surmultiplié par vingt, au
moins. Ce sont toutes les villes du royaume et même celles d’Egypte, de l’Inde
et de la Chine, qui nous regardent et nous considèrent, comme autant de
jumelles, qu’il ne leur faut pas copier !
Les
sarcasmes du vieux Sénateur
Je
crois que je n’ai rien de grave se dit-il. Que Dieu pardonne à ceux qui rendent
les ruines, pardon, les rues sales. Il fait allusion me semble-t-il, le
Sénateur blessé, à ce que j’ai écrit plus haut et de bien bas ! Enterrés
qu’ils sont dans leurs bureaux et autres fonctions, cumulées, ils ne s’en
occupent pas ! Je marche, les orteils insensibles, le pied pendant, craignant
de chuter encore une fois !
Laissons
le Sénateur aller se plaindre au bon Dieu et lui adresser un tweet ! Occupons-nous
de réfléchir ensemble.
J’en
oublie ce que je viens de penser. Faut-il m’arrêter à chaque pas pour écrire le
terme épatant qui me tombe du ciel et fixer l’idée, qui vient me booster, sur
un calepin ? Comment puis-je râler sans mots dire ? Inutile, de les noter,
elles sont vite parties, ces récriminations, comme elles sont venues. Mes phrases
mièvres et pleureuses, mes expressions, s’enfuient et s’oublient. Alzheimer
vous salut ! Comme ces rêves épuisants, qui me réveillent en sursaut, me cassent
mon sommeil, me gâchent mes fantasmes et anéantissent mes songes. Hé, Sénateur,
c’est toi qui parle encore, à mes ouïes ! Tu fais dans la
télépathie ? Ou quoi ?
Oui,
Docteur, vous m’avez entendu. Vous avez utilisé mon crédo et ma foi. C’était des paroles pour une prière, les
lyrics adressés à Dieu. Je veux le faire, tant que je suis encore vivant et que
j’ai des pensées pour Lui. Mes camarades d’amphi, au parlement, sont presque
tous morts. Pour moi, pour le prier et le louer par-delà la mort, je pense que
mon travail est un acte de piété, j’y mets tout mon cœur. Pourquoi pas ?
Ça vous fâche que je crie ou j’y crois fort !
Maintenant que j’y pense et que
je peux encore le faire. N’est-ce pas Docteur, me dit-il ! Il était monté me
voir, on lui a dit que je remplaçais le Dr Balbi. Et pourquoi pas quelques
avances, une anticipation de louanges, d’admiration et de prières à Dieu ?
Docteur ! Ceci, je le fais, afin de combler les moments d’inexistence ou
d’inconscience, les moments vides de corps et de vies, les phases inconnues,
d’outre-tombe et d’anéantissement à venir…Vous vous y connaissez ? Non,
Sénateur, la mystique, comme la politique, ne figuraient pas dans nos
programmes scientifiques ! On aurait dû vous les enseigner.
De
quoi me rappellerais-je et de quoi puis-je alors témoigner ? De quoi
serais-je responsable et comptable, alors ? Quoi me reprocher ou de quoi
être sanctionné, le jour du Jugement Dernier ? Vais-je avoir un retour de
mémoire, ce dont je me plains déjà ? Tant que j’y pense, Bon Dieu, tous
ces assassins et ces criminels, les parangons de cette pseudo démocratie, ces
infâmes fauteurs de guerre, pas besoin de les réveiller pour les juger. Hein,
yak a Sidi ? Garde-les aux fins fonds de leurs tombes et qu’ils ne se
réveillent plus jamais ! Pourquoi vous fatiguer et dépenser du feu pour
rien ? Sénateur Bassou, lui dis-je, vous n’avez rien aux genoux ni aux
pieds. Vous pouvez vous lever. Je vous laisse continuer vos charitables réflexions
et vos questions existentielles. Je suis juste à côté pour vous laisser vous reposer.
Une piqure d’anti-inflammatoire vous a été faire en plus d’un léger calmant. Alors,
c’est une clinique ici. Non, juste un médecin.
Le
Parlementaire pose des questions à Dieu
Enfin !
Je reviens à moi de peur de ces précipices. En vie, j’ai déjà oublié bien des
choses de cette même vie, les bons actes comme les plus mauvais ou les gratuits.
Cet oubli, qu’on craint qui est général et touche les riches et les pauvres,
les rois et les puissants qui les commandent, comme les fourmis, ces manants
que nous sommes, envers eux. Les arbres et les insectes ! Tous, passent,
feuille par feuille, organe par organe, molécule par molécule, ils flétrissent
et se perdent à jamais ! Ces êtres extraordinaires, savent-ils qu’ils
existent et que sentent-ils, quand on les coupe ? Nous, nous osons dire
que nous avons une conscience et une personnalité, si mineures soient-elles. Sentent-ils
leur être, tous ces végétaux dont nous nous servons sur terre pour nous
construire et nous alimenter ? Et ces petits animaux, ont-ils une conscience ou
l’équivalent d’un esprit qui les distingue les uns des autres ? Et
pourtant ils vivent, en parties, quand nous leur empruntons leurs protides
comme autant de composants, pour nous autres, robots humains ?
Revenons
au végétal. Le bois brûle et va en cendres, en fumées et en chaleur !
S’ils n’y pensent pas, ils penchent aussi de la tête, ces bambous qui se
prélassent dans le vaste jardin de mon riche voisin. Les fils électriques d’en
face, telles des portées, offrent aux cimes de ces roseaux de jouer leurs notes
musicales. Ils palpitent et leur feuillage frétille et se trémousse ! Des
symphonies complexes, des bruits que je n’entends pas, une musique que je ne
peux comprendre. Tout bouge sous l’effet de l’air complice et des sifflements
des vents, tout vit et j’en suis inconscient ! Les feuilles fanées tombent
épuisées dans l’oubli, victimes des vers, des champignons et des maladies.
Ventre à terre, elles gisent immobiles, glanées par la terre qui les a nourries
et élevées pour les ensevelir avant de les recycler !
Voici,
un Parlementaire qui réfléchit
Je
vous ai entendu parler à voix forte. Vous parlez en dormant, Si Bassou !
En tout cas, merci, vous m’avez fait un cours dont je me rappellerais
longtemps !
Le
Sénateur continue, les yeux allumés ! La Résurrection, ce rappel, dans quelle
forme et dans quel état serais-je ? En tout cas, avec cette santé résiduelle,
cette mémoire capricieuse, volatile ou nulle, je me pose la question ! De quoi,
ce moi ou ce que je serais, se rappellera-t-il ? Quel souvenir de moi, des
choses ou de mes actes, garderais-je, demain ? Moi qui me rappelle, tellement
peu, de ma propre vie actuelle!
Tu
me parles de karma de métempsychose et renouvellement du corps, de son retour
sur terre, encore et encore, à la vie ! Une fois épuisé, parti, dissous
sous les décombres, solubilisé sous terre ! Une fois le physique, réduit à
zéro, sans énergie, c’est la chimie qui s’occupera des restes, désassemblés, pour
les restituer et les vitaliser ! Et là je rends hommage à ces plantes, ces
feuilles, ces fleurs, ces insectes, ces bêtes et leurs chairs. Je rends grâce à
ces vies que j’ai coupées ou indirectement à leur corps arraché…A tous ces professeurs
et ouvriers invisibles de moi, qui m’ont instruit, fait penser, construit et composé,
tel que je suis. Tous ces bouts de vies, mâchés, bus, collés et racolés, ces
êtres élevés, nourris, minorés puis arrachés et qui m’ont composé et réparé,
vêtu, chaussé, puis donné de l’énergie et des calories, de la vie enfin, pour
voir, penser, écrire, bouger ou nager !
Eh
bien, Sénateur, avec vous, j’ai oublié ce que j’avais à faire. Vous avez appris
ça dans votre Parti ou au Parlement ?
Confortable,
ce lit médical qui fait rêver
Hier,
à Fès, avant de tomber ici, je rêvassais à la sortie du mausolée de Moulay
Idriss. Sa majesté le Roi, vient de le faire réparer. Je levais en sortant les
yeux espérant rencontrer une étoile entre ces nuages devenus nombreux. Je vais
lui demander d’être mon témoin et de répondre de confirmer ma foi,
demain ! Serais-je là dans un an pour refaire les mêmes prières devant ces
astres qui sont si éloignés et que de mémoire d’homme, elles ne communiquent
pas ? Et jusqu’à quand lèverais-je ces yeux embués, pour dénicher à travers la
brume, ces étoiles dont j’ignore le nombre et les noms ?
Elles
clignotent, entre les nuages qui passent en dansant ! Les stars, et par
bonheur, reparaissent, pour répondre à ma quête et apaiser ma raison.
M’ont-elles entendu ? Vont-elles transmettre, ma requête, ma prière, mon
mot à Allah ?
Mon
lecteur ne le pense pas ! Il doit se dire, par bonté, que je délire,
assurément. Un délire mystique autodidacte, qui n’a pas eu besoin de savants,
d’encens ni d’oulémas, pour entrer en extase !
Visions
entre les anges, les seins et les nuages
Quel
bonheur de flotter et de nager entre de si nombreux seins, si fluides et
nourrissants, des anges aux formes volubiles, libres et changeantes, qui sans
jamais s’arrêter, voyagent sur leur tapis d’air, au gré des vents.
J’attends
un ange. Ce fut un oiseau qui vint. Il surgit je ne sais d’où, il frétille
entre les feuilles de bambou et sautille en chantant ! Je comprends qu’il
veut que je le libère de ses chaînes. Car les oiseaux ne sont pas autorisés à
devenir des esclaves ni à chanter en cage. Or, c’est lui qui est venu me
délivrer !
Il
me dit dans un langage que j’essaie d’interpréter. Les aphtes sont les angines
de l’amour. Malgré tes blessures, soldat, tu peux recevoir le respect, comme un
droit et faire l’amour, comme un devoir, pour ton, honneur et ton pays. Les
mors brûlent les effluves du cœur. La tendresse, l’affection est le vrai amour.
L’autre est attirance, sans plus, et sentiment de possession. Le silence ne
cache pas la mauvaise haleine. Ce n’est pas en baillant qu’on se réveille. Les
meilleurs dons ne délivrent pas de la misère. Inutile d’ouvrir les yeux, si tu
veux te cacher. Cache-toi de toi-même, si tu veux critiquer quelqu’un ! Trinque
au lieu de fumer, tu mourras dans la joie.
Autant
de messages allégoriques et de métaphores paradoxales qui ne s’appliquent point
à moi. Cet ange travesti en oiseau ne pouvait-il pas se présenter sous une
figure humaine ? Peut-être l’a-t-il déjà fait et qu’il m’ait trouvé un
brin réservé ou distant parce que trop méfiant ? Pourtant, peu avisé, sans
préjugés péjoratifs, je reste ouvert, un peu trop crédule. Je n’aimerais pas me
présenter devant un juge rigide par trop inquisiteur et qui pousserait la
correction, la sanction, jusqu’à m’humilier et m’abaisser, là haut !
Le
Sénateur reposé, vous remercie, Docteur !
Et,
puis, ces copies d’articles parus sur les journaux, on me conseille de me plus
des distribuer. L’isolement pervers sera au complet. Oui, ils les rejettent
sans les lire, tes écrits lubriques, loquace Sénateur. C’est pour moi, ta
marâtre bénévole, un affront. Toi qui ne voulais pas publier et qui avais fui
ce sordide et fourbe, ce pervers idiot, toi qui sans amis, avais perdu tes
compères parlementaires et oublié tes repères politiciens, te voilà servi.
Esseulé sans âme, isolé dans une autre ville, un vieux corps, sans espoir et sans
dieu ? Comment, c’est faux ! Ce corps perclus dans ses faiblesses et ses
douleurs, au milieu des balivernes et des délires, noyé lâchement dans les
choses puériles, s’accroche avec espoir, aux tâches virtuelles.
Ebahi
par le parlementaire, je vais commencer à les aimer !
Comme
quoi, les feuilles mortes, qui font glisser les gens par terre, nous font
rencontrer, par hasard, des Parlementaires, qui méritent leurs salaires. C’est
combien, pour vous, docteur Balbi ? Je ne suis pas le Dr Balbi, monsieur
Bassou ! C’est moi qui devrais vous payer.
Levez-vous,
enchanté de vous avoir connu et servi. Vous pouvez revenir quand vous voulez.
C’est gentil, mais si votre ville reste comme ça, aussi sale que glissante, je
devrais en déménager…Je dirais ça demain à Mme la Wali…Mais elle a déménagé. Ah,
dommage ! Je crois qu’avec ces pertes de conscience nouvelles, que je me
dois de vous consulter à nouveau, pour un bilan plus élargi ? Non !
Ce ne sont pas des pertes de mémoire, mais des prises de conscience notoires !
Des prises de positions civiques communes… Disons ! Je vous présenterais
alors à Mme Student. Ah, la préceptrice du prince David Salomon. Je la connais…
Dr
Idrissi My Ahmed, Kénitra le 24 Octobre 2015